Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/38

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au pied de la lettre son affirmation essentielle du mouvement dialectique. La compréhension philosophique du fait que le savoir absolu se relativise et retombe dans l’opposition au monde de l’esprit subjectif est approfondissement du concept de la dialectique hégélienne. D’où les belles métaphores où Marx reprend Hegel pour décrire la dialectique comme mouvement, comme flot incessant. La dialectique, comme essence des déterminations ontologiques, « fait tomber ces déterminations en collision avec le monde concret et les force à révéler ce qu’elles sont en réalité, l’idéalité du concret[1]». La dialectique est une force qui prend son essor, dissout les déterminations de l’entendement et de la représentation ; elle est le fleuve qui charrie tout, la mort, mais aussi la source d’où tout renaît, la vie. En tant que ressort du développement, elle porte le support spirituel individuel en qui le développement arrive à la conscience[2]. Elle fait entrer en mouvement les concepts des philosophes et les ramène à leur mesure, révélant la haine de la vie chez tous les philosophes conservateurs, la crispation hautaine et pleine de raideur qui les pousse à arrêter le développement effectif. C’est encore elle qui démasquera, à propos des météores, le principe épicurien de la conscience de soi abstraite retirée du monde.

Ce qui est en jeu dans cette pensée de la dialectique, c’est le monde de l’histoire, c’est le fondement de toute action théorique ou politique, de toute transformation du monde, de toute praxis. Comme le note Cornu, cette conception permet à Marx de dépasser à la fois Hegel et les Jeunes hégéliens[3].

  1. . Travaux préparatoires, fragment : le Transfert de l’idéalité dans les atomes.
  2. . Ibidem, fragment : Sur la forme subjective de la philosophie platonicienne.
  3. . Une fois accompli le renversement matérialiste qui distingue radicalement le développement réel du développement pensé, la dialectique sera libérée et pourra être utilisée pour construire le reflet du développement réel. On ne pourra plus être tenté d’y réduire le développement réel, car l’exposition dialectique du mouvement devra toujours composer avec une analyse historique rigoureuse. Ceci est mis au point dans l’introduction à la Critique de l’économie politique (1857).