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la lutte des classes en france

journées avaient servi la patrie. Un autre demandait l’érection par décret d’une statue équestre du duc d’Orléans sur la place du Carrousel. Thiers appelait la constitution un morceau de papier sale. Des orléanistes apparaissaient successivement à la tribune et exprimaient leur repentir d’avoir conspiré contre la monarchie légitime ; les légitimistes se reprochaient d’avoir avancé la chute de la royauté en général en se rebellant contre la royauté illégitime. Thiers déplorait d’avoir intrigué contre Molé, Molé contre Guizot, Barrot contre tous les trois. Le cri de : « Vive la République démocratique et sociale ! » fut déclaré inconstitutionnel. Le cri de : « Vive la République ! » fut considéré comme socialiste. A l’anniversaire de la bataille de Waterloo, un représentant proclama : « Je crains moins l’invasion des Prussiens que la rentrée en France des réfugiés révolutionnaires ». Baraguay d’Hilliers répondait aux plaintes qu’on lui exprimait sur le terrorisme organisé à Lyon et dans les départements voisins : « J’aime mieux la terreur blanche que la terreur rouge[1] ». L’Assemblée applaudissait frénétiquement chaque fois que tombait des lèvres de ses orateurs une épigramme lancée contre la République, la révolution et la constitution, en faveur de la royauté et de la Sainte-Alliance. Contrevenir aux plus petites formalités républicaines, s’adresser aux représentants sans les

  1. En français dans le texte.