Page:Marx - La Lutte des classes en France - Le 18 brumaire de Louis Bonaparte, 1900.djvu/182

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
164
la lutte des classes en france

tées, l’engagea à opter pour ce dernier département. La victoire du 10 mars cessa d’être décisive. L’échéance fut de nouveau retardée. La vigueur populaire s’énerva. On l’accoutuma aux succès légaux plutôt qu’aux triomphes révolutionnaires. La signification révolutionnaire du 10 mars, la réhabilitation de l’insurrection de juin, fut tout à fait compromise par la candidature d’Eugène Sue, le fantaisiste social, petit bourgeois et sentimental, candidature que le prolétariat ne pouvait accepter tout au plus que comme une plaisanterie destinée à plaire aux grisettes. Le « parti de l’ordre », enhardi par la politique flottante de ses adversaires, opposa à cette candidature bien pensante un candidat qui devait représenter la victoire de Juin. Ce candidat comique fut Leclerc, le père de famille à la Spartiate, dont l’armure héroïque tomba pièce par pièce sous les coups de la presse et qui subit, d’ailleurs, une brillante défaite le jour de l’élection. La nouvelle victoire électorale du 28 avril remplit de présomption la Montagne et la petite bourgeoisie. Elle se flattait en imagination de remettre le prolétariat au premier plan en usant de la voie purement légale, sans avoir recours à une nouvelle révolution et d’arriver ainsi au comble de ses vœux. Elle comptait fermement, aux nouvelles élections de 1852, installer, grâce au suffrage universel, Ledru-Rollin sur le fauteuil présidentiel et faire entrer dans l’Assemblée une majorité de Montagnards.