pour ainsi dire, auraient dû précéder la Révolution de Février pour en faire autre chose que l’ébranlement superficiel qu’elle a été. La société semble être revenue en deçà de son point de départ. En réalité, il lui faut se créer un point de départ révolutionnaire, la situation, les rapports, les conditions dans lesquels seuls la Révolution moderne devient sérieuse.
Les révolutions bourgeoises comme celles du xviiie siècle volent de succès en succès, leurs effets dramatiques se surpassent, les hommes et les choses semblent étinceler, l’extase est l’état d’esprit ordinaire ; mais des mouvements semblables vivent peu ; ils atteignent rapidement leur point culminant et un long malaise saisit la société avant qu’elle n’apprenne à s’approprier froidement les résultats de sa période d’agitation. Par contre, les révolutions prolétariennes comme celles du xixe siècle font constamment elles-mêmes leur propre critique, interrompent continuellement leur cours, reviennent sur ce qui semblait accompli pour recommencer de nouveau, raillent, avec une profondeur pleine de cruauté, les imperfections, les faiblesses, les misères de leurs premières tentatives, paraissent n’abattre leur adversaire que pour lui permettre de puiser de nouvelles forces en touchant le sol et de se redresser plus gigantesque ; elles reculent de peur devant l’immensité infinie du but poursuivi jusqu’à ce que se soit créée la situation qui rend impossible toute rétrograda-