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Page:Marx - La Lutte des classes en France - Le 18 brumaire de Louis Bonaparte, 1900.djvu/52

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la lutte des classes en france

et le gouvernement provisoire reçoit l’hommage d’une foule de délégations, toutes prêtes à sauver la patrie et la société. Quand les ouvriers paraissent devant l’Hôtel de Ville pour remettre au gouvernement provisoire le produit d’une collecte patriotique faite au Champ-de-Mars, ils apprennent à leur grande surprise que la bourgeoisie de Paris a battu leur fantôme en un combat imaginaire très prudemment ménagé. L’effrayant attentat du 16 mars fournit le prétexte du rappel de l’armée à Paris, ce qui était le but de cette comédie grossière et fit naître l’occasion de démonstrations réactionnaires et fédéralistes en province.

Le 4 mai se réunit l’Assemblée Nationale, issue d’élections directes et générales. Le suffrage universel ne possédait pas la vertu magique que des républicains d’ancienne marque lui avaient attribuée. Pour eux, toute la France, au moins la majorité des Français étaient des citoyens ayant les mêmes intérêts, le même jugement, etc.

C’était, chez eux, une conséquence de leur culte du peuple. Les élections mirent en lumière, au lieu de leur peuple imaginaire, le peuple réel ; elles désignèrent des représentants des classes dont il se compose. Nous avons vu pourquoi les paysans et les petits bourgeois devaient marcher au scrutin sous la conduite des bourgeois prêts à la lutte et des grands propriétaires fonciers enragés de restauration. Mais si le suffrage universel n’était pas la baguette magique que croyaient les braves