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de juin 1848 au 13 juin 1849
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tion sur les sommets du pouvoir. Elle les obligeait ainsi, non seulement en fait, mais jusque dans leurs propres phrases à nier et à révoquer les anciennes paroles. Le peuple pouvait alors jeter à la voirie de l’histoire le mélange dégoûtant qu’ils formaient. Aucune apostasie ne fut épargnée à ce Barrot, à cette incorporation du libéralisme bourgeois qui pendant dix-huit ans avait caché le vide misérable de son esprit sous un maintien grave. Si parfois, le contraste trop choquant entre les chardons du présent et les lauriers du passé l’effrayait lui-même, il lui suffisait d’un coup d’œil donné à son miroir pour voir s’y refléter une contenance ministérielle et une suffisance bien humaine. Ce que le miroir lui renvoyait, c’était Guizot qu’il avait constamment envié, constamment censuré, Guizot lui-même, mais paré du front olympien d’Odilon. Ce qu’il ne voyait pas, c’étaient les oreilles de Midas.

Le Barrot du 24 février se révéla dans le Barrot du 20 décembre. Orléaniste et voltairien, il s’associa comme ministre des cultes, le légitimiste, le jésuite Falloux.

Peu de jours après, le ministère de l’intérieur était confié à Léon Faucher, le disciple de Malthus. Le droit, la religion, l’économie politique ! Le ministère Barrot contenait tout cela ; de plus, il réunissait les orléanistes et les légitimistes. Le bonapartiste seul faisait défaut. Bonaparte cachait encore l’envie qu’il avait d’être Napoléon. Soulouque