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de n’avoir reçu aucun principe, ou d’avoir usé toute vertu dans la molesse, comme les Sybarites, est-il possible, dis-je, qu’une créature humaine puisse tomber dans cet excès de foiblesse et de dépravation.

Une Femme semblable n’est pas plus monstre de déraison que quelques Empereurs romains dépravés par le pouvoir arbitraire ; cependant depuis que les Rois sont plus assujettis aux lois et au foible frein de l’honneur, l’histoire n’offre pas de pareils exemples de folie et de cruauté, et le despostisme qui étouffe le germe des vertus et du génie n’opère plus de semblables ravages en Europe, si l’on en excepte la Turquie où il frappe de stérilité le sol et les hommes.

Mais par-tout il est le même pour les Femmes ; car, sous le prétexte de conserver leur innocence, mot poli dont on se sert pour qualifier l’ignorance dans laquelle on les retient, on leur soustrait la vérité pour leur faire prendre un caractère artificiel avant qu’elles puissent faire usage de leurs facultés. Endoctrinées dès l’enfance à regarder la beauté comme le sceptre des Femmes, leur esprit devient l’ombre de