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en négligeant ces ennuyeux devoirs domestiques, pour courir après le plaisir emporté sur les aîles du tems.

Je ne sais quel auteur a dit : « Le pouvoir de la Femme est dans sa sensibilité ». Cependant les hommes, sans s’inquiéter des conséquences, font tout ce qu’ils peuvent pour étendre l’empire de cette sensibilité. Ceux d’entr’eux dont la profession en suppose le plus, et qui l’exercent habituellement, jouissent en effet de plus d’influence dans la société ; par exemple, les poëtes, les peintres et les compositeurs[1]. Or, quand cette sensibilité est ainsi accrue aux dépens de la raison et même de la faculté d’imaginer de fortes et vastes conceptions, la légéreté des hommes est toute naturelle ; et je ne sais pas pourquoi les philosophes se plaignent d’un effet dont ils

  1. Les hommes de ces sortes de profession mettent de la sensibilité dans leurs ouvrages pour en lier les matériaux ; et les fondant pour ainsi dire avec la passion, ils donnent une ame à un corps privé de vie ; mais dans l’imagination des Femmes, il n’y a que l’amour qui concentre ces rayons éthérés.