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massé… doine
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On jugea prudent de retraiter en toute hâte pour se diriger plus au nord-est, contourner autant que possible les cantons de Granby et Shefford, les plus à redouter et là surtout où la milice était le plus en éveil.

On marcha dans les bois pendant plusieurs heures et, vers midi, on arriva au bord d’une rivière, la branche nord de la Yamaska qu’il fallait bien franchir à gué, quelque danger que l’on courût.

Mr Roberts se hasarda le premier suivi par le métis François et Célestin Parent. C’étaient les trois colosses du groupe. Les trois autres, de moindre taille, restés sur le rivage, voyant que leurs compagnons avaient de l’eau jusqu’aux aisselles, n’osèrent s’y aventurer et remontèrent la rivière sur une certaine distance afin de trouver un endroit plus facilement guéable. Ils finirent par le découvrir et, une fois rendus sur l’autre rive, grelottants, ils remirent leurs vêtements et firent diligence pour rejoindre Roberts et les guides.

Ils n’y purent parvenir. Leurs appels mêmes restèrent sans réponse soit que la distance qui les séparait d’eux fut trop considérable, soit que leurs voix ne portassent pas par défaut de résonnance, accidents de terrain, etc.

Ils durent, à la fin, se rendre à l’évidence. Ils se voyaient en pleine forêt, à la merci du hasard, des bêtes fauves, sans provisions, sans guide, sans boussole.

— Continuer dans ces conditions, c’est de la folie, opina Saint-Georges. Nous n’avons qu’à retourner dans les paroisses et attendre les événements.

— Il me semble que nous n’avons pas le choix, appuya M. Simon. Nous avons 99 chances sur 100 de crever de misère. Va pour les seigneuries.

— Et moi, mes amis, dit Thomas, j’aime mieux la rage des loups ou des ours que la haine des bureaucrates. D’ailleurs, avec un peu de chance et quelques jours de marche, nous atteindrons la frontière.