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NAPOLÉON À SAINTE-HÉLÈNE

un refusait de l’accompagner, deux chefs d’escadrons français, deux capitaines polonais, trois lieutenants, dont deux à un an de service. Quelle misère !

Au moins ceux qui allaient l’accompagner étaient-ils tels qu’ils pussent lui rendre dans la captivité l’essentielle consolation de le servir à sa guise, de le distraire, de fournir un aliment à son oisiveté, d’apaiser ses nerfs irritables, de lui tenir société ? Sauf à l’île d’Elbe, où pourtant il ne chômait pas un jour d’audiences ni de visites, il n’avait jamais senti le poids des heures, entraîné qu’il était par la course effrénée de ses destins, par l’obligation des affaires auxquelles le jour et la nuit ne suffisaient point, par la représentation militaire et civile, par cette vie où, à juger par son œuvre, les années comptèrent pour lui comme les siècles pour le commun des hommes. Mais, à présent, il avait besoin qu’on l’entourât, qu’on le distrayât, qu’on écartât les pierres de sa route, que, sans servilité ni bassesse, on lui formât une cour. Qu’étaient-ce donc les quatre hommes qui allaient vivre avec lui, — qu’il les eût choisis ou qu’ils se fussent imposés à son choix ?

Un, dès qu’il s’offrait, n’avait pas à être discuté : le général comte Bertrand, grand maréchal du Palais. « Bertrand est désormais identifié à mon sort, a dit Napoléon ; c’est devenu historique. »