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LES COMMISSAIRES

Le duc de Richelieu tenta vainement d’obtenir de Montchenu qu’il acceptât en échange de Sainte-Hélène une place de chargé d’affaires ou même de ministre dans une petite cour d’Allemagne. Mais l’autre tenait que « sa commission était de la plus haute importance pour la France », et, outre qu’« elle le mettait à 2.000 lieues de ses créanciers », elle lui assurait un traitement de 30.000 francs qu’il espérait bien voir augmenter, qui fut en effet, en 1817, porté à 60.000 francs avec effet rétroactif et qu’il demanda ensuite qu’on relevât à 100.000, à quoi on n’acquiesça point. De plus, on le fit maréchal de camp le 22 novembre 1815, et il en toucha les appointements de 10.000 francs. Moyennant quoi, il ne donna pas un verre d’eau à qui que ce fût et s’institua pique-assiette chez le gouverneur, les commissaires, les officiers anglais et les négociants, si bien qu’il fut surnommé le Marquis de Monter-chez-nous. « C’est, dit un de ces officiers, une parfaite représentation de l’Ancien Régime. » Cela est trop ; Montchenu n’en fut que la caricature ; il était tel par ses naïvetés, sa sottise, son inexpérience de la vie contemporaine, par sa haine furieuse contre Buonaparte, par son avidité et sa goinfrerie, un caractère, dirait-on, de convention, un personnage irréel, tant il poussait à l’extrême tous les ridicules dont il semblait uniquement composé et que personne n’eût osé imaginer accumulés ainsi sur un seul homme.

En formant sa suite, il avait amené un aide de