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NAPOLÉON AUX BRIARS

nouveau ; il y trouvait, avec les rires, la gaieté, les sottes questions et les coq-à-l’âne des petites Balcombe, cette fraîcheur veloutée, ces cheveux blonds, cette naïveté délurée dès jeunes Anglaises coloniales, pétulantes, inéduquées et sans gêne. Celles-ci eussent pu servir de type, mais elles n’en déplaisaient pas plus à Napoléon, qui avait toujours eu comme une réserve de jeunesse et même d’enfance ; la vie austère et grave qu’il avait menée durant ses années d’école, de régiment et, presque tout de suite, de commandement, cette vie de pauvreté qui ne lui permettait même pas les distractions de ses camarades officiers, cette vie de demi-solde après les campagnes de Toulon et d’Italie ; puis, tout de suite, dans un ouragan de passion, cette course dans la gloire, cette envolée icarienne vers la toute-puissance, — cette vie lui avait laissé un arrière-besoin de jouer, de courir, d’entendre des naïvetés, presque d’en dire. Ainsi, parfois avec Joséphine, avec la petite cousine Stéphanie, avec Marie-Louise surtout, qui ne comprenait pas ces jovialités ; et les Miss Balcombe apparaissaient à propos, avec leur jargon anglo-français, leur chronologie bizarre, leur questionnaire comique, et l’horreur quelles éprouvaient pour le terrible Boney et qui, si aisément, eût tourné à la passion.

Avec Las Cases que, par ordre de l’Empereur, son fils, indispensable aux écritures, était venu rejoindre, la journée passait au travail. L’Empe-