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LA QUESTION D’ARGENT

Cette protestation, passant par-dessus la tête de Lowe, s’élevait comme une plainte d’une éloquence suprême ; en tant que lettre privée, elle eût paru déclamatoire, mais elle était destinée à la publicité et celle qu’elle reçut fut immense. La question d’argent ne fut assurément pas de celles qui frappèrent le moins la sensibilité des peuples ; le contraste entre l’opulence d’hier et la misère d’à présent ne pouvait manquer d’émouvoir, et si quelques-uns des compagnons de l’Empereur craignaient que, par de telles réclamations, on ne diminuât le prestige de Napoléon, ils se trompaient à cette fois. L’âme populaire n’a point de ces petitesses, et l’Empereur la jugeait bien.

Mais plus vivement Napoléon menait contre Lowe et le gouvernement anglais sa campagne de paroles et d’écrits, plus strictement Lowe s’affermissait dans ses consignes et aspirait à mater son prisonnier. La question des dépenses lui était un excellent prétexte pour l’isoler, lui enlever des compagnons qui ne manquaient point de l’exciter, pour le réduire par la solitude et par l’ennui : la prison cellulaire sous l’équateur. Il ne manqua donc pas de se prévaloir des dépenses qu’exigeait la présence de cinquante-cinq personnes pour réclamer le renvoi d’un certain nombre : « C’est seulement, écrivait-il, par une diminution dans le nombre des personnes que l’on peut effectuer une réduction matérielle dans la dépense. » On devrait commencer par les « officiers de sa suite, lesquels