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LE BUSTE DU ROI DE ROME

Le croit-il ? Se le figure-t-il vraiment ? On le dirait : « Sa figure rayonne ; elle exprime d’une façon frappante l’amour paternel et l’orgueil qu’il éprouve d’être le père d’un si aimable enfant. » Il est évidemment enchanté des éloges enthousiastes qu’y donnent les Balcombe, mais il tient presque autant à l’avantage qu’il doit en tirer sur le gouverneur. Lowe n’a-t-il pas pensé à briser le buste, à le jeter à la mer ? Ne l’a-t-il pas retenu pendant plusieurs jours ? « S’il ne me l’avait point remis, dit l’Empereur, je me proposais de faire une plainte qui eût fait dresser les cheveux sur la tête à tout Anglais ; j’eusse raconté des choses qui l’eussent fait exécrer par toutes les mères en Angleterre comme un monstre à figure humaine. » Mais il l’a remis ; la plainte alors n’a plus d’objet. Assurément ; mais il a voulu le briser : « Regardez cela, dit l’Empereur, regardez cette figure. Il faudrait être bien barbare, bien atroce pour vouloir briser une figure semblable. Je regarderais l’homme capable de le faire ou de l’ordonner comme plus méchant que celui qui administre le poison à un autre, car celui-ci a quelque but en vue, tandis que celui-là n’est poussé que par la plus noire atrocité, et il est capable de tous les crimes. »

Ce n’est pas assez : ces discours ne sortent pas de l’entourage auquel ils s’adressent, et l’Empereur veut qu’ils retentissent. Lowe a dit que le buste ne vaut pas les cent louis qu’on en demande. « Pour moi, il vaut un million », dit l’Empereur, et il com-