Page:Maupassant, Des vers, 1908.djvu/81

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III

Pendant cinq mois entiers, chaque soir, sur la rive,
Plein d’un emportement qui jamais ne faiblit,
J’ai caressé sur l’herbe ainsi que dans un lit
Cette fille superbe, ignorante et lascive.
Et le matin, mordus encor du souvenir,
Quoique tout alanguis des baisers de la veille,
Dès l’heure où, dans la plaine, un chant d’oiseau s’éveille,
Nous trouvions que la nuit tardait bien à venir.

Quelquefois, oubliant que le jour dût éclore,
Nous nous laissions surprendre embrassés, par l’aurore.
Vite, nous revenions le long des clairs chemins,
Mes deux yeux dans ses yeux, ses deux mains dans mes mains.
Je voyais s’allumer des lueurs dans les haies,
Des troncs d’arbre soudain rougir comme des plaies,
Sans songer qu’un soleil se levait quelque part,
Et je croyais, sentant mon front baigné de flammes,
Que toutes ces clartés tombaient de son regard.
Elle allait au lavoir avec les autres femmes ;