Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/195

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térêt pour vous que lorsqu’un académicien meurt. Plus il en meurt, plus vous devez être heureuses. Mais pour qu’ils meurent vite, il faut les nommer vieux et malades.

Comme on demeurait un peu surpris, il ajouta :

— Je suis comme vous d’ailleurs et j’aime beaucoup lire dans les échos de Paris le décès d’un académicien. Je me demande tout de suite : « Qui va le remplacer ? » Et je fais ma liste. C’est un jeu, un petit jeu très gentil auquel on joue dans tous les salons parisiens à chaque trépas d’immortel : « Le jeu de la mort et des quarante vieillards. »

Ces dames, un peu déconcertées encore, commençaient cependant à sourire, tant était juste sa remarque.

Il conclut, en se levant :

— C’est vous qui les nommez, mesdames, et vous ne les nommez que pour les voir mourir. Choisissez-les donc vieux, très vieux, le plus vieux possible, et ne vous occupez jamais du reste.

Puis il s’en alla avec beaucoup de grâce.

Dès qu’il fut parti, une des femmes déclara :

— Il est drôle, ce garçon. Qui est-ce ?

Mme Walter répondit :

— Un de nos rédacteurs, qui ne fait