Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lui semblait qu’on venait de lui montrer quelque trou plein d’ossements, un trou inévitable où il lui faudrait tomber un jour. Il murmura : « Bigre, ça ne doit pas être gai, chez lui. Je ne voudrais pas un fauteuil de balcon pour assister au défilé de ses idées, nom d’un chien ! »

Mais, s’étant arrêté pour laisser passer une femme parfumée qui descendait de voiture et rentrait chez elle, il aspira d’un grand souffle avide la senteur de verveine et d’iris envolée dans l’air. Ses poumons et son cœur palpitèrent brusquement d’espérance et de joie ; et le souvenir de Mme de Marelle qu’il reverrait le lendemain l’envahit des pieds à la tête.

Tout lui souriait, la vie l’accueillait avec tendresse. Comme c’était bon, la réalisation des espérances !

Il s’endormit dans l’ivresse et se leva de bonne heure pour faire un tour à pied, dans l’avenue du Bois-de-Boulogne, avant d’aller à son rendez-vous.

Le vent ayant changé, le temps s’était adouci pendant la nuit, et il faisait une tiédeur et un soleil d’avril. Tous les habitués du Bois étaient sortis ce matin-là, cédant à l’appel du ciel clair et doux.

Duroy marchait lentement, buvant l’air léger, savoureux comme une friandise de printemps. Il passa l’Arc de triomphe de