Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/258

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Et il n’entendit rien.

Mais il vit aussitôt un peu de fumée au bout du canon de son pistolet ; et comme l’homme en face de lui demeurait toujours debout, dans la même posture également, il aperçut aussi un autre petit nuage blanc qui s’envolait au-dessus de la tête de son adversaire.

Ils avaient tiré tous les deux. C’était fini.

Ses témoins et le médecin le touchaient, le palpaient, déboutonnaient ses vêtements en demandant avec anxiété :

— Vous n’êtes pas blessé ?

— Il répondit au hasard :

— Non, je ne crois pas.

Langremont, d’ailleurs, demeurait aussi intact que son ennemi, et Jacques Rival murmura d’un ton mécontent :

— Avec ce sacré pistolet, c’est toujours comme ça, on se rate ou on se tue. Quel sale instrument !

Duroy ne bougeait point, paralysé de surprise et de joie : « C’était fini ! » Il fallut lui enlever son arme qu’il tenait toujours serrée dans sa main. Il lui semblait maintenant qu’il se serait battu contre l’univers entier. C’était fini. Quel bonheur ! il se sentait brave tout à coup à provoquer n’importe qui.

Tous les témoins causèrent quelques mi-