Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/450

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Du Roy avait reposé son chapeau sur une chaise. Il attendait, très attentif.

— Alors, qu’est-ce qu’il y a ?

— Ils vont s’emparer du Maroc !

— Allons donc. J’ai déjeuné avec Laroche qui m’a presque dicté les intentions du cabinet.

— Non, mon chéri, ils t’ont joué parce qu’ils ont peur qu’on connaisse leur combinaison.

— Assieds-toi, dit Georges.

Et il s’assit lui-même sur un fauteuil. Alors elle attira par terre un petit tabouret, et s’accroupit dessus, entre les jambes du jeune homme. Elle reprit, d’une voix câline :

— Comme je pense toujours à toi, je fais attention maintenant à tout ce qu’on chuchote autour de moi.

Et elle se mit, doucement, à lui expliquer comment elle avait deviné depuis quelque temps qu’on préparait quelque chose à son insu, qu’on se servait de lui en redoutant son concours.

Elle disait :

— Tu sais, quand on aime, on devient rusée.

Enfin, la veille, elle avait compris. C’était une grosse affaire, une très grosse affaire préparée dans l’ombre. Elle souriait maintenant,