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LE BÛCHER.

puis l’incendie gagna le bois, et une clarté violente illumina la côte, le galet, et l’écume des lames brisées sur la plage.

Elle grandissait de seconde en seconde, éclairant au loin sur la mer la crête dansante des vagues.

La brise du large soufflait par rafales, accélérant l’ardeur de la flamme, qui se couchait, tournoyait, se relevait, jetait des milliers d’étincelles. Elles montaient le long de la falaise avec une vitesse folle et, se perdant au ciel, se mêlaient aux étoiles dont elles multipliaient le nombre. Des oiseaux de mer réveillés poussaient leur cri plaintif, et, décrivant de longues courbes, venaient passer avec leurs ailes blanches étendues dans le rayonnement du foyer, puis rentraient dans la nuit.

Bientôt, le bûcher ne fut plus qu’une masse ardente, non point rouge, mais jaune, d’un jaune aveuglant, une fournaise fouettée par le vent. Et tout à coup sous une bourrasque plus forte, il chancela, s’écroula en partie en se penchant vers la mer, et le mort découvert apparut tout entier, noir sur sa couche de feu, et brûlant lui-même avec de longues flammes bleues.

Et le brasier s’étant encore affaissé sur la droite, le cadavre se retourna comme un