Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/15

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Alors, elle tendit sa main en la laissant pendre au bout du poignet. Les bagues brillaient sur ses doigts blancs ; et les ongles roses, très effilés, semblaient des griffes amoureuses poussées au bout de cette mignonne patte de femme.

Olivier Bertin, doucement, la maniait, en l’admirant. Il faisait remuer les doigts comme des joujoux de chair, et il disait :

— Quelle drôle de chose ! Quelle drôle de chose ! Quel gentil petit membre, intelligent et adroit, qui exécute tout ce qu’on veut, des livres, de la dentelle, des maisons, des pyramides, des locomotives, de la pâtisserie, ou des caresses, ce qui est encore sa meilleure besogne.

Il enlevait les bagues une à une ; et comme l’alliance, un fil d’or, tombait à son tour, il murmura en souriant :

— La loi. Saluons.

— Bête ! dit-elle, un peu froissée.

Il avait toujours eu l’esprit gouailleur, cette tendance française qui mêle une apparence d’ironie aux sentiments les plus sérieux, et souvent il la contristait sans le vouloir, sans savoir saisir les distinctions subtiles des femmes, et discerner les limites des départements sacrés, comme il disait. Elle se fâchait surtout chaque fois qu’il parlait avec une nuance de blague familière de leur liaison si longue qu’il affirmait être le plus bel exemple