Page:Maupassant - L’Inutile Beauté, OC, Conard, 1908.djvu/162

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Le voisin disait :

— Vrai, on croirait qu’elles ont parfois contre leur mari une sorte d’hostilité particulière, par cela seul qu’il est leur mari. Moi, j’aime ma femme. Je l’aime beaucoup, je l’apprécie et je la respecte ; eh bien ! elle a quelquefois l’air de montrer plus de confiance et d’abandon à nos amis qu’à moi-même.

Bondel aussitôt pensa : "Ça y est, ma femme avait raison."

Lorsqu’il eut quitté cet homme, il se remit à songer. Il sentait en son âme un mélange confus de pensées contradictoires, une sorte de bouillonnement douloureux, et il gardait dans l’oreille le rire impertinent, ce rire exaspéré qui semblait dire : "Mais il en est de toi comme des autres, imbécile." Certes, c’était là une bravade, une de ces impudentes bravades de femmes qui osent tout, qui risquent tout pour blesser, pour humilier l’homme contre lequel elles sont irritées.

Donc ce pauvre monsieur devait être aussi un mari trompé, comme tant d’autres. Il avait dit avec tristesse : "Elle a quelquefois l’air de montrer plus de confiance et d’abandon à nos amis qu’à moi-même." Voilà donc comment un mari - cet aveugle sentimental