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MA FEMME.

c’est tant pis pour toi, mon garçon, on ne s’adresse pas aux jeunes filles.

« Ou bien tu t’es trompé étant gris, comme tu le dis. Alors c’est encore tant pis pour toi. On ne se met pas dans des situations aussi sottes. De toute façon, la pauvre fille est perdue de réputation, car on ne croira jamais à des explications d’ivrogne. La vraie victime, la seule victime là dedans, c’est elle. Réfléchis. »

Et il s’en alla pendant que je lui criais dans le dos : — « Dites tout ce que vous voudrez. Je n’épouserai pas. »

Je restai seul encore une heure.

Ce fut ma tante qui vint à son tour. Elle pleurait. Elle usa de tous les raisonnements. Personne ne croyait à mon erreur. On ne pouvait admettre que cette jeune fille eût oublié de fermer sa porte à clef dans une maison pleine de monde. Le colonel l’avait frappée. Elle sanglotait depuis le matin. C’était un scandale terrible, ineffaçable.

Et ma bonne tante ajoutait : « Demande-la toujours en mariage ; on trouvera peut-être moven de te tirer d’affaires en discutant les conditions du contrat. »

Cette perspective me soulagea. Et je consentis à écrire ma demande. Une heure après je repartais pour Paris.