Page:Maupassant - La Maison Tellier.djvu/304

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Alors il la regarda, et il sentit entre eux un infranchissable abîme. Elle battait les herbes de son ombrelle, la tête un peu baissée, contemplant ses pieds, et chantant, filant des sons, essayant des roulades, osant des trilles.

Son petit front étroit, qu’il aimait tant, était donc vide, vide ! Il n’y avait là-dedans que cette musique de serinette ; et les pensées qui s’y formaient par hasard étaient pareilles à cette musique. Elle ne comprenait rien de lui ; ils étaient plus séparés que s’ils ne vivaient pas ensemble. Ses baisers n’allaient donc jamais plus loin que les lèvres ?

Alors elle releva les yeux vers lui et sourit encore. Il fut remué jusqu’aux moelles, et, ouvrant les bras, dans un redoublement d’amour, il l’étreignit passionnément.

Comme il chiffonnait sa robe, elle finit par se dégager, en murmurant par compensation : — « Va, je t’aime bien, mon chat. »

Mais il la saisit par la taille, et, pris de folie, l’entraîna en courant et il l’embrassait sur la joue, sur la tempe, sur le cou, tout en