Page:Maupassant - La Vie errante.djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ravins profonds dans les fourrés de lentisques et de chênes-lièges, soit dans le désert jaune entre deux dattiers qui se penchent au-dessus, l’un à droite, l’autre à gauche, et laissent tomber sur la coupole de lait l’ombre légère et fine de leurs palmes.

Ils contiennent, comme une semence sacrée, les os de marabouts qui fécondent le sol illimité de l’islam, y font germer de Tanger à Tombouctou, du Caire à La Mecque, de Tunis à Constantinople, de Khartoum à Java, la plus puissante, la plus mystérieusement dominatrice des religions qui aient dompté la conscience humaine.

Petits, ronds, isolés, et si blancs qu’ils jettent une clarté, ils ont bien l’air d’une graine divine jetée à poignée sur le monde par ce grand semeur de foi, Mohammed, frère d’Aïssa et de Moïse.

Pendant longtemps, nous allons, au grand trot des quatre chevaux attelés de front, par des plaines sans fin plantées de vignes ou ensemence de céréales qui commencent à sortir de terre.

Puis soudain la route, la belle route établie par les ponts et chaussées depuis le protectorat français, s’arrête net. Un pont a cédé aux der-