Page:Maupassant - Le Horla.djvu/360

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voyant bien à présent qu’il n’en voulait pas à sa vie, elle céda, sans trop de peine, pas très fâchée, car il était fort, le gars, mais par trop brutal vraiment.

Quand elle se fut relevée, l’idée de ses seaux répandus l’emplit tout à coup de fureur, et, ôtant son sabot d’un pied, elle se jeta, à son tour, sur l’homme, pour lui casser la tête s’il ne payait pas son lait.

Mais lui, se méprenant à cette attaque violente, un peu dégrisé, éperdu, épouvanté de ce qu’il avait fait, se sauva de toute la vitesse de ses jarrets, tandis qu’elle lui jetait des pierres, dont quelques-unes l’atteignirent dans le dos.

Il courut longtemps, longtemps, puis il se sentit las comme il ne l’avait jamais été. Ses jambes devenaient molles à ne le plus porter ; toutes ses idées étaient brouillées, il perdait souvenir de tout, ne pouvait plus réfléchir à rien.