Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/225

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Donc, ce que je veux vous raconter, c’est ma première femme du monde, la première femme du monde que j’ai séduite. Pardon, je veux dire la première femme du monde qui m’a séduit. Car au début, c’est nous qui nous laissons prendre, tandis que, plus tard… c’est la même chose.

C’était une amie de ma mère, une femme charmante d’ailleurs. Ces êtres-là, quand ils sont chastes, c’est généralement par bêtise, et quand ils sont amoureux, ils sont enragés. On nous accuse de les corrompre ! Ah bien oui ! Avec elles, c’est toujours le lapin qui commence, et jamais le chasseur. Oh ! elles n’ont pas l’air d’y toucher, je le sais, mais elles y touchent ; elles font de nous ce qu’elles veulent sans que cela paraisse ; et puis elles nous accusent de les avoir perdues, déshonorées, avilies, que sais-je ?

Celle dont je parle nourrissait assurément une furieuse envie de se faire avilir par moi. Elle avait peut-être trente-cinq ans ; j’en comptais à peine vingt-deux. Je ne songeais pas plus à la séduire que je ne songeais à me faire trappiste. Or, un jour, comme je lui rendais visite, et que je considérais avec étonnement son costume, un peignoir du matin considérablement ouvert, ouvert comme une porte d’église