Page:Maupassant - Les vieilles, paru dans Le Gaulois, 25 juin 1882.djvu/6

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Aussi, quand une vieille femme est vraiment séduisante, elle semble avoir pris en elle tout le charme de toutes les autres, et vous ne pouvez la connaître et aimer sans un constant et mordant regret qu’elle ne soit plus à l’âge où vous la sauriez chérir d’une affection tout autre.

Et que de gré ne lui devons-nous pas garder d’être ainsi charmante, car elle a passé par le plus épouvantable, le plus dévorant supplice que puisse souffrir une créature : elle a vieilli.

La femme est faite pour aimer, pour être aimée, et pour cela seulement. Est-il au monde un être plus puissant, plus adoré, plus obéi, plus triomphant, plus éclatant qu’une jolie femme dans l’épanouissement de sa beauté ? Tout lui appartient, les hommes, les cœurs, les volontés. Elle règne d’une manière absolue par le seul fait de son existence, sans souci, sans travail, dans une plénitude d’orgueil et de joie.

Alors elle s’accoutume à ces hommages comme l’enfant s’accoutume à respirer, comme le jeune oiseau s’habitue à voler. C’est la nourriture de son être ; et toujours, où qu’elle aille, qu’elle dorme ou qu’elle veille, elle porte en elle le senti-