Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/28

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Et il écrivit lentement. Lorsqu’il eut fini, Gontran demanda :

— Veuillez me relire le nom de ma sœur ?

— Oui, Monsieur. Mme Anterpat.

Christiane, riant aux larmes, paya ses cachets, puis demanda :

— Qu’est-ce qu’on entend là-haut ?

Gontran la prit par le bras :

— Viens voir.

Des voix furieuses arrivaient par l’escalier. Ils montèrent, ouvrirent une porte et aperçurent une grande salle de café avec un billard au milieu. Des deux côtés de ce billard, deux hommes en manches de chemise, une queue de bois à la main, s’invectivaient avec fureur.

— Dix-huit.

— Dix-sept.

— Je vous dis que j’en ai dix-huit.

— Ça n’est pas vrai, vous n’en avez que dix-sept.

C’était le directeur du Casino, M. Petrus Martel, de l’Odéon, qui faisait sa partie ordinaire avec le comique de sa troupe, M. Lapalme, du Grand-Théâtre de Bordeaux.

Petrus Martel, dont le ventre puissant et mou ballottait sous sa chemise au-dessus du pantalon attaché on ne sait comment, après avoir été cabotin en divers lieux avait pris le gouvernement du Casino d’Enval et passait ses journées à boire les consommations destinées aux baigneurs. Il portait une immense moustache d’officier, trempée du matin