Page:Maupassant - Pierre et Jean, Ollendorff, 1888.djvu/177

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qu’à son côté, Roland, un foulard sur la tête et tourné vers le mur, s’obstinait à dormir. Rien ne l’éveillait tant qu’on ne l’avait pas secoué à lui arracher le bras. Les jours de pêche, c’était la bonne, sonnée à l’heure convenue par le matelot Papagris, qui venait tirer son maître de cet invincible repos.

Pierre, en allant vers elle, regardait sa mère ; et il lui sembla tout à coup qu’il ne l’avait jamais vue.

Elle lui tendit ses joues, il y mit deux baisers, puis s’assit sur une chaise basse.

— C’est hier soir que tu as décidé cette partie ? dit-elle.

— Oui, hier soir.

— Tu reviens pour dîner ?

— Je ne sais pas encore. En tout cas, ne m’attendez point.

Il l’examinait avec une curiosité stupéfaite. C’était sa mère, cette femme ! Toute cette figure, vue dès l’enfance, dès que son œil avait pu distinguer, ce sourire, cette voix si connue, si familière, lui paraissaient brusque-