Page:Maupassant - Romans, paru dans Gil Blas, 26 avril 1882.djvu/7

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Le romancier ne doit pas plaider, ni bavarder, ni expliquer. Les faits et les personnages seuls doivent parler. Et le romancier n’a pas à conclure ; cela appartient au lecteur.

Cette question d’art, très confuse en beaucoup d’esprits, donnerait peut-être l’explication de bien des haines littéraires. Il est des gens qui ne peuvent comprendre que si on leur dit : « La pauvre femme était bien malheureuse », ceux-là ne pénétreront jamais les grands artistes dont la mystérieuse puissance est tout intentionnelle, et sobre de commentaires. L’œuvre porte leur indéniable marque par sa matière et sa contexture ; mais jamais on ne voit surgir leur opinion, ni leurs desseins profonds s’expliquer par des raisonnements. Et quand ils décrivent, on dirait que les faits, les objets, les paysages se dressent, parlent, et se racontent eux-mêmes ; car il faut une géniale et tout originale impersonnalité pour être