Page:Maupassant - Théâtre, OC, Conard, 1910.djvu/184

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Jean de Sallus, devenu amoureux de moi après m’avoir vue à l’Opéra-Comique. Il connaissait déjà le notaire de papa. Il a été très gentil, pendant les premiers temps ; oui, très gentil ! Je crois vraiment qu’il m’aima. Et moi aussi, j’étais très gentille pour lui, très gentille. Certes, il n’a pas pu m’adresser l’ombre d’un reproche.

Jacques de Randol.

L’aimiez-vous ?

Madame de Sallus.

Mon Dieu ! ne faites donc jamais de ces questions-là !

Jacques de Randol.

Alors, vous l’aimiez ?

Madame de Sallus.

Oui et non. Si je l’aimais, c’était comme une petite sotte. Mais je ne le lui ai jamais dit, car je ne sais pas manifester.

Jacques de Randol.

Ça, c’est vrai.

Madame de Sallus.

Oui, il est possible que je l’aie aimé quelque temps, niaisement, en jeune femme timide, tremblante, gauche, inquiète, toujours effarouchée par cette vilaine chose, l’amour d’un homme, par cette vilaine chose, qui est aussi très douce, quelquefois ! Lui, vous le connaissez. C’est un beau, un beau de