Page:Maupassant - Théâtre, OC, Conard, 1910.djvu/196

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Madame de Sallus.

Vous devenez injuste pour lui. La jalousie vous rend méchant.

Jacques de Randol.

Je ne me trompe pas, soyez-en sûre.

Madame de Sallus.

Si, vous vous trompez. Mon mari, jadis, m’a négligée, abandonnée, me trouvant niaise, sans doute. Maintenant, il me trouve mieux et revient à moi. Rien de plus simple. Tant pis pour lui, d’ailleurs, car il ne tenait qu’à lui que je fusse une honnête femme toute ma vie.

Jacques de Randol.

Madeleine !

Madame de Sallus.

Eh bien ! quoi ?

Jacques de Randol.

Cesse-t-on d’être une honnête femme quand, rejetée par l’homme qui a pris charge de votre existence, de votre bonheur, de votre tendresse et de vos rêves, on ne se résigne pas, étant jeune, belle et pleine d’espoir, à l’éternel isolement, à l’éternel abandon ?

Madame de Sallus.

Je vous ai déjà dit qu’il y a des choses auxquelles il ne faut point trop penser. Celle-là est du nombre. (On entend deux coups de timbre.) C’est mon mari. Tâchez de lui plaire. Il est fort ombrageux en ce moment.