Page:Maupassant - Yvette, OC, Conard, 1910.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
121
YVETTE.

sonnier. Elle ne riait point, gardant sur le visage une gravité pâle, une sorte d’immobilité sinistre. Servigny interrompait son clairon pour hurler des commandements. Le prince et le chevalier s’amusaient beaucoup, trouvaient ça très drôle et de haut goût. Les deux jeunes gens jouaient du tambour d’une façon ininterrompue.

Quand ils arrivèrent sur le lieu de la fête, ils soulevèrent une émotion. Des filles applaudirent ; des jeunes gens ricanaient ; un gros monsieur, qui donnait le bras à sa femme, déclara, avec une envie dans la voix :

— En voilà qui ne s’embêtent pas.

Elle aperçut des chevaux de bois et força Belvigne à monter à sa droite tandis que son détachement escaladait par derrière les bêtes tournantes. Quand le divertissement fut terminé, elle refusa de descendre, contraignant son escorte à demeurer cinq fois de suite sur le dos de ces montures d’enfants, à la grande joie du public qui criait des plaisanteries. M. de Belvigne, livide, avait mal au cœur en descendant.

Puis elle se mit à vagabonder à travers les baraques. Elle força tous ces hommes à se faire peser au milieu d’un cercle de spectateurs.