Page:Maupassant - Yvette.djvu/53

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Saval aussi semblait sérieux, absorbé. De temps en temps, il prenait dans sa main, d’un geste familier, sa barbe brune qu’il portait taillée en pointe, à la Henri III, et il paraissait songer à des choses profondes.

Personne ne dit rien pendant quelques minutes.

Puis, comme on passait une truite, Servigny déclara :

— Le silence a quelquefois du bon. On est souvent plus près les uns des autres quand on se tait que quand on parle ; n’est-ce pas, marquise ?

Elle se retourna un peu vers lui, et répondit :

— Ça c’est vrai. C’est si doux de penser ensemble à des choses agréables.

Et elle leva son regard chaud vers Saval ; et ils restèrent quelques secondes à se contempler, l’œil dans l’œil.

Un petit mouvement presque invisible eut lieu sous la table.

Servigny reprit :

— Mam’zelle Yvette, vous allez me faire croire que vous êtes amoureuse si vous continuez à être aussi sage que ça. Or, de qui pouvez-vous être amoureuse ? cherchons ensemble, si vous