Page:Maurice Goudard - La défense du libéralisme.pdf/72

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Mais, une fois assuré le bien-être des travailleurs, je pensai qu’un officier « social » se devait de soutenir le moral des troupes. Panem et circenses, disaient les Romains. La guerre était alors une longue attente. Le moral des soldats se dégradait dans l’ennui du cantonnement. J’eus une idée lumineuse. J’allais créer le cinéma aux Armées. Je soumis mon plan au général Gérard, commandant la 8° Armée. Effrayé par mon audace, le général se borna à m’assurer qu’il me faisait confiance et qu’il fermerait les yeux. Pour un militaire, mon programme était révolutionnaire et mon officier d’administration était affolé. Au mépris de tous les règlements, avec mes hommes encadrés par le Génie, nous montâmes 30 salles en bois de 1.000 places chacune, réparties sur tout le front de la 8° Armée, à quelques kilomètres des lignes. J’avais avancé l’argent pour acheter les appareils de projection et, à l’aide de mes fiches, j’avais immédiatement repéré toute une équipe de spécialistes, opérateurs, électriciens, contrôleurs et encaisseurs, au nombre d’une centaine, qui assuraient l’exploitation. Le prix d’admission était de vingt sous pour les civils et deux sous pour les militaires, avec plus d’un million d’entrées par mois. Grâce à un roulement continu de films, le programme était changé tous les soirs et le dimanche deux fois par jour. Les recettes étaient telles que les appareils furent amortis en trois mois et que l’on put projeter, en même temps qu’à Paris, les meilleurs films du moment, Forfaiture, par exemple.