Page:Maurice Joly - Recherches sur l'art de parvenir - Amyot éditeur - 1868.djvu/40

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degré, avec la même force ; c’est le chapitre des contradictions morales, contradictions qui éclatent dans le fond de l’âme humaine, et rendent sa physionomie aussi insaisissable que le mouvement de la mer. Ces mêmes masses qui admirent le pouvoir, qui supposent si facilement dans les ministres, dans les hommes d’État, le génie, la grandeur, le désin­téressement, ces masses croient ceux qui les gouvernent capables de tout. Elles supposent à l’action du pouvoir des mobiles monstrueux, des infamies qui ne sont pas même vraisemblables. Et c’est ainsi que se propagent des bruits inconcevables, des anecdotes sans nom, des calomnies qui s’attachent aux réputations, les dégradent pour longtemps, quelquefois pour toujours.

L’envie! et si vous voulez tout dire, dites l’Envie française, il n’y a rien au-delà ; car l’envie en France ex­plique ce qu’il y a de plus fort, les révolutions. On se range sous un drapeau et on le quitte par envie. On ne hait pas sérieusement ses adversaires politiques, mais les gens du même parti se haïssent cordialement, on peut le croire ; ils s’envient.

Le mérite personnel est ce qu’il y a de plus envié et par suite de plus odieux. On envie la pauvreté, on envie le malheur dès qu’il s’y joint la moindre dignité, la moindre grandeur, et ici on a la clef d’une contradiction apparente. Un écart de conduite, une faute ont par exemple déconsi­déré le caractère d’un homme politique. A entendre les clameurs et