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chasses et voyages au congo

de tirer, ne croyant pas possible que nous continuions à voir du gibier en si grandes quantités, mais ensuite la satiété vous prend, et au lieu de tuer l’on s’amuse au contraire à regarder les bêtes et à les observer dans tous leurs déplacements. On ne songe plus à tirer, si ce n’est pour régler une lorgnette sur une cible vivante, et étudier en même temps l’effet et les qualités des différents calibres employés, ainsi que l’expansion des balles, et si celles-ci sont arrêtées il leur sortie par la’peau extérieure en opposition à leur entrée. Par exemple, j’ai maintes fois constaté la cabrade de l’animal blessé d’un « Blattschuss » suivi d’une charge affolée en plein train, et ne s’abattant que 200 à 300 mètres plus loin. Ainsi, l’ai-je vu faire par les totpis, les hippos et mon buffle No 2 au Soudan.


15 février, 6 heures matin.

Cette nuit à 12 h. 1/2 le lion a passé en rugissant tout près de nos tentes, mais il ne nous a pas laissé le temps d’en sortir et déjà sa chasse l’avait entraîné au loin. Nous aurions eu de la peine à le voir dans l’obscurité, et je suis de plus en plus convaincu, que la capture d’un lion est une affaire de pure chance et de hasard, car ces bêtes, comme tous les fauves d’ailleurs, ne circulant généralement que la nuit, il faut un concours extraordinaire de circonstances pour y réussir.

Le vent qui soufflait en rafales hier soir s’est apaisé et ce matin au lever nous jouissons d’une délicieuse fraîcheur ; espérons qu’elle se prolongera, car nous avons eu perspective la longue étape à travers la plaine qui doit nous mener aujourd’hui aux bords de la Ruindi ; mais déjà le soleil se lève radieux à travers une espèce de buée diaphane qui rappelle celles d’Europe en automne au départ pour la chasse. À l’ouest les montagnes que nous devrons gravir dans deux jours, se couvrent de reflets bleus et roses ; sur le sol, l’herbe rase semblable à des chaumes pelés d’un champ pauvre, prend la teinte et le brillant d’une pièce