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chasses et voyages au congo

du ciel se dégageant des nuages, bleuit à vue d’œil, et les rayons du soleil viennent me caresser le visage. Vite, remettons notre casque, oublié un instant, car être sans casque serait dès ce moment déjà dangereux et peut-être mortel, en exposant son crâne nu aux rayons redoutables qui vous broient.

Nous nous remettons en route, et quand nous arrivons au col, de nouveau la mer de nuages de ce matin s’est reformée sous nous et nous cache les pays inconnus vers lesquels nous dévalons et dont seulement quelques vagues contours se dévoilent ; nous-mêmes cheminons en plein soleil parmi les hautes herbes humides de rosée et les fougères trempées et ornées comme chez nous de fils de la Vierge dans lesquelles le tippoye promène et baigne mon assise ; et nous assistons au spectacle inoubliable et rare d’un brouillard dans les montagnes des tropiques.

Le tracé de la future route contourne le flanc de la montagne de serpentins inattendus et ci et là forme des arabesques déroutantes. Levant le nez de dessus mon bloc-notes, je vois le tippoye de ma femme avec son parasol aux larges couleurs italiennes, à la même hauteur vis-à-vis de moi, de l’autre côté du ravin et toujours dans les fonds, coupant la verdure d’une blessure saignante, les euphorbes aux coraux flamboyants y font une merveilleuse tache de couleur. Nous jouissons de l’enchantement d’un matin radieux de toute la beauté de la lumière des tropiques sans ses ardeurs et ses souffrances, et ce sont de ces moments qui paient largement toutes les peines endurées, tout cornue la mort du buffle ou de l’éléphant après la dure traversée des marais, vous récompense de l’effort accompli.

De bonne humeur, j’achète à Mapuli (surnommé Mirabeau à cause de sa faconde inépuisable) sa boîte en bois qui lui sert de nécessaire de voyage, et que je paye sans discuter les 20 francs qu’il a demandés, n’ayant jamais cru à pareille aubaine.

Devant moi en file indienne, la caravane fend les hautes