Page:Maurois - Les Silences du colonel Bramble (Grasset 1918).djvu/176

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et les poussait hors des murs des villes pour des razzias profitables. C’est encore cette même force, Aurelle, qui, chaque été avant la guerre, couvrait de tentes nomades les plages désertiques de l’Europe, et c’est l’obscur souvenir de la razzia ancestrale qui, le Ier août 1914 (époque des vacances, Aurelle, époque des migrations), incita les plus jeunes des barbares à lâcher leur empereur sur le monde. C’est une vieille comédie qui se joue tous les deux mille ans, mais le public semble encore y prendre quelque intérêt. C’est qu’il se renouvelle.

— Vous êtes pessimiste ce soir ! dit Aurelle, que la tiède surprise d’un poêle à pétrole inclinait à la bienveillance.

— Qu’appelez-vous pessimisme ? dit le docteur en retirant péniblement ses bottes durcies. Je crois que les hommes auront toujours des passions et qu’ils ne cesseront point de s’envoyer les uns aux autres à intervalles