Page:Maurois - Les Silences du colonel Bramble (Grasset 1918).djvu/179

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« Ces vieux textes sont parfois d’une bien curieuse actualité. »

Votre formidable guerre européenne a la même importance, Aurelle, que les luttes de deux fourmilières dans un coin de mon jardin d’Irlande.

— Elle en a beaucoup plus pour nous, dit Aurelle, et il me semble que la qualité des sentiments qu’elle suscite n’est pas animale. Croyez-vous que les fourmis soient patriotes ?

— Certainement, répondit le docteur ; les fourmis doivent être ardemment patriotes. Chez elles les races guerrières sont richement entretenues par une nation de serviteurs. Chaque saison, leurs armées partent en campagne pour voler les œufs d’espèces plus faibles. Des ouvrières en sortent, qui naissent esclaves dans une demeure étrangère. La bourgeoisie militaire est ainsi délivrée de la servitude du travail et ces soldats ne savent même plus manger. Enfermés avec du miel