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L’animal appréhendant de raviver la douleur n’osera pas appuyer les dents, perdra jusqu’à guérison l’habitude de tiquer ; et l’acheteur pourra laisser passer le délai sans s’en apercevoir.

Plus souvent le marchand a soin de faire mâcher à l’animal en le bridant un sialagogue quelconque, afin que l’écume empêche de bien distinguer les dents, et l’on vous dit que le cheval à la bouche fraîche. Ou bien encore s’il n’emploie pas ce moyen, il ouvre la bouche et vous montre l’âge en abaissant la lèvre de l’arcade inférieure si la dent est usée aux incisives supérieures, et en soulevant la lèvre supérieure si ce sont les pinces inférieures qui ont subi l’usure.

D’autres fois, le marchand emploie un moyen plus effronté l’animal vérifié et rendu, il tâche de le garder quelques heures de plus ou le vend à condition de ne le livrer que le lendemain, alléguant un besoin, et c’est alors qu’il profite du sursis pour limer les dents. Plus tard en s’apercevant du vice, l’acheteur n’a rien de plus empressé que d’inculper le vétérinaire chargé de la vérification. C’est donc à l’acheteur à revoir l’animal lors de la livraison, sans cela il courrait le risque de perdre ses droits, à moins de prouver la fraude, par la grossièreté du coup de lime, ou de s’assurer que l’animal ne peut user ses dents si le tic se fait en l’air ; la preuve dolosive serait encore plus évidente. Mais comme il y a toujours difficulté pour l’expert, il faut qu’il soit très prudent.

Une autre fraude qui nous a été signalée par notre père, et qui lui a causé quelques désagréments, c’est l’entente du vendeur avec un domestique indélicat, ou qui va perdre sa place ; ainsi un cheval a le tic rédhibitoire, par conséquent peu visible au moment de l’achat, et douze à quinze jours après, l’homme d’écurie a l’air de