Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/312

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
284
LA CIVILISATION ET LE GRANDS FLEUVES

xviiie siècle[1], ces philosophes n’avaient pas l’honnêteté ou la hardiesse d’abandonner franchement la religion nationale ; mais le Bouddha Çakya Mouni, ou tout autre fondateur de cette religion, n’eut d’autre mérite, en enseignant le dogme de l’égalité naturelle de tous les hommes, que d’oser proclamer sur la place publique une vérité démontrée déjà depuis Kapila. Trop peu soucieux des choses terrestres, Bouddha ne songea guère plus à l’abolition des castes[1], que le christianisme n’avait songé à l’affranchissement des esclaves[2], il se contenta de dépouiller la hiérarchie castale de toute sanction religieuse. Mais lorsque l’invasion macédonienne eut réveillé de leur torpeur séculaire les peuples du bassin indo-gangétique, une grande révolution éclata, dont le bouddhisme ne fut certes point le promoteur, mais qui donne à cette religion une importance non prévue ou même non désirée par ses premiers apôtres. Un Çoudra que les Pouranas nomment Tchandragroupta, et que nos savants identifient avec le Sandracottus à la cour duquel avait résidé le grec Mégasthène, tua le roi Nanda, le dernier rejeton de la dynastie kouravienne et réunit « sous un même parasol » les cent dix-huit peu-

  1. a et b Max Müller. Essais de Mythologie comparée.
  2. Je dois dire cependant que le bouddhisme n’a point, à l’égard des castes, ces ménagements que l’on rencontre si souvent dans saint Paul, par exemple, envers l’esclavage. La religion de Çakya Mouni affirme hautement que les hommes sont égaux et que les castes sont une iniquité : à ce dogme surtout il doit ses succès en Chine et en Mongolie.