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présent *harçem répondant à skr. pṛcchâmi « je demande », lat. poscō, et un aoriste harçi հարցի répondant à l’imparfait ; or, on a bien eharç եհարց « il a demandé » en face de skr. ápṛcchat, 1ère pers. sing. harçi հարցի « j’ai demandé », mais le présent est harçanem հարցանեմ « je demande », où -ane- անե est une addition arménienne. On expliquera de même luçanem լուցանեմ « j’allume » (aor. luçi լուցի), de *leuk-ske-, cf. arm. loys լոյս « lumière », çuçanem ցուցանեմ « je montre » (aor. çuçi ցուցի), de *skeu-ske-, cf. v. h. a. scouwôn « contempler », gr. δυο-σϰό(ϝ)ος (duo-sko(w)os) ; sans doute aussi ançanem անցանեմ « je passe » (aor. ançi անցի).

Les factitifs en -uçanem ուցանեմ appartiennent au type en -anem –անեմ, v. § 85.

b) Type en -i- –ի–

77. — Le type en -i- –ի– a deux fonctions.

1° Il fournit des passifs aux verbes en -e- –ե– par simple substitution de -i- –ի– à -e- –ե– : berim բերիմ « je suis porté », lk‘anim լքանիմ, « je suis laissé ».

2° Il fournit des verbes pareils à ceux du type en -e- –ե– et qui jouent le rôle que jouent en indo-iranien et en grec les verbes à désinences exclusivement moyennes, en latin et en irlandais les déponents : ainsi nstim նսւոիմ « je m’assieds », cf. gr. ἕζομαι (hezomai) ; meṙanim մեռանիմ « je meurs », cf. skr. mriyáte « il meurt », lat. morior.

Ce -i- –ի– rappelle le slave -i- ou le lituanien -i- des verbes exprimant l’état, comme v. sl. bĭd-i-tŭ « il veille » ; une forme thématique du même suffixe a fourni à l’indo-iranien ses passifs en -ya-, comme skr. budh-yá-te « il est éveillé » et au grec des verbes exprimant l’état, comme μαίνεται (mainetai) « il est fou ». Ce serait la forme athématique, attestée en baltique et en slave, qu’on retrouverait en arménien, à moins qu’on ne suppose une forme *-iye-, indiquée par skr. mr-iyá-te « il meurt », par gr. Ϝιδ-ίω (Wid-iô) « je sue » et par quelques autres verbes ; car un ancien *-ye- aurait donné avec les consonnes précédentes des combinaisons diverses et n’aurait pas abouti à -i- ; c’est ainsi que le *-ye- du type indo-européen connu en *-ye- constamment thématique, semble avoir donné *-ǰe- dans ǰnǰem ջնջեմ « j’enlève, j’essuie », cf. gr. θείνω (theinô) ; l’arménien a peu de traces de