Page:Meillet - Esquisse d'une grammaire comparée de l'arménien classique (1936).djvu/124

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intérieur de aṙnuçum առնուցում représente -oy- issu de *-u-y- : *aṙnu-yçum.

91. — Le subjonctif aoriste présente la même caractéristique (sauf dans le verbe anomal tal տալ « donner », v. § 101), mais avec une flexion un peu différente, et, en partie, plus archaïque : la 1ère personne du singulier de l’aoriste actif est en -iç –ից, ainsi ber-iç բեր–ից « que je porte, je porterai », gorceç-iç գործեց-ից « que je fasse, je ferai » ; -iç –ից représente *-iskô, et c’est la seule trace arménienne de la première personne en *-ō du type gr. φέρω (pherô) ; la flexion est la même que celle de içem իցեմ aux 2me et 3me personnes du singulier et à la 3me du pluriel : ber-çes բեր-ցես, ber-çē բերցես, ber-çen բեր–ցեն, la chute de i entraîne rencontre de deux ç dans les aoristes dont le thème est terminé par ç ց ; le groupe subsiste dans les thèmes monosyllabiques, ainsi baç-iç բացից « que j’ouvre, j’ouvrirai », cf. baç-i բաց-ի ; 2me personne baççes բացցես ; mais devient -sç- –ug– dans les thèmes polysyllabiques : gorcesçes գործեսցես « que tu fasses, tu feras », cf. gorceç-i գործեսց–ի « j’ai fait » ; mnasçes մնասցես « que tu restes, tu resteras », cf. mnaç-i մնաց–ի « je suis resté ». La 1ère personne du pluriel berçuk‘ բերցուք « que nous portions, nous porterons » fait difficulté ; l’absence de -m- ne peut s’expliquer phonétiquement et résulte probablement de l’absence de -m- à la 1ère personne du singulier beriç բերից, le u représenterait ō, cf. subjonctif gr. φέρωμεν (pherômen). La 1ère personne sing. du subjonctif aoriste beriç բերից s’expliquerait par l’addition de l’élargissement -*ske- à une ancienne forme en -ī- de l’optatif athématique tel qu’on le trouve dans lat. sim, s-ī-mus, où il y a eu des actions analogiques. Le difficile est de comprendre comment intervient ici en arménien le type athématique. Car les aoristes arméniens tels que beri, eber, բերի, եբեր et gorceaç գործեաց, reposent sur d’anciens thèmes thématiques (voir § 83) ; et l’on verra (§ 101) qu’un aoriste anomal tel que arari, arar արարի, արար est à rapprocher de gr. ἤραρον, ἤραρε (êraron, êrare). Il faudrait sans doute admettre que dans l’aoriste arménien interviennent des restes d’aoristes athématiques (voir § 102, fin). Mais les seuls qui soient clairs sont des formes anomales : edi, ed եդի, եդ (voir § 101). Le subjonctif ediç եգից s’expliquerait donc directement, à ceci près que la généralisation e- ե– de l’augment est secondaire.