Page:Meillet - Esquisse d'une grammaire comparée de l'arménien classique (1936).djvu/59

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
57

հաւր « du père », en face de gr. πατρός (patros). — Ainsi -k‘ –ք s’est trouvé réservé au pluriel qu’il caractérisait. Après *n, *-s se maintient, notamment à l’acc. plur., -s –ս répond à *-ns de crétois -νς (ns), got. -ns, ainsi gets գետս « fleuves » (*-ons), bans բանս « paroles » etc. Et *-n- d’une finale en *-nt se maintient : ekn եկն « il est venu », de *egent, cf. skr. ágan ; k‘san քսան « vingt », cf. lat. viginti.

L’arménien ne conserve donc d’éléments consonantiques de l’ancienne fin du mot que dans peu de cas ; mais la chute de la voyelle de toute syllabe finale a eu pour conséquence que tous les mots de l’arménien classique se sont trouvés terminés par un élément consonantique. On a un nominatif-accusatif-locatif k’unքուն « sommeil » terminé par -n –ն, un génitif-datif k‘noy քնոյ terminé par -y –յ, un instrumental k‘nov քնով terminé par -v –վ, etc. Lorsqu’un mot arménien autre qu’un monosyllabe est terminé par une voyelle, c’est que son élément consonantique en finale est tombé à une date relativement récente ou s’est combiné avec une voyelle précédente ; ainsi représente *-ey ; la 3me personne berē բերէ repose sur *bere-y et est parallèle à ała-y աղա–յ « il moud ». Après -i- ի et -u- ու, un *-y tombe en arménien, ainsi beri բերի « il est porté » de *beri-y, heł-u հեղու « il verse » de *hełu-y, heru հերու « l’an dernier », de *heru-y, cf. gr. πέρυσι (perusi), etc. Un -oy, –ոյ issu de *֊osyo subsiste au gén.-dat.-abl. k‘noy քնոյ « du sommeil ». Quant à -ay –այ, il y a souvent hésitation dans les manuscrits entre -ay –այ et -a –ա ; toutefois, le -y manque d’ordinaire dans certains mots comme la finale des démonstratifs du type na նա, gén. nora նորա, où il s’agit d’une diphtongue finale dès le principe, cf. lit. tas-ai « celui-ci », et ne reparaît alors que si un article enclitique s’y ajoute, ainsi noray-n նորայ–ն. — De même -w tombe après -u : zgestu զգեսաու, instrumental de zgest զգեստ « vêtement », a un ս –ու final issu de *-uw. Dans le cas du -y- intervocalique, la chute de la sonante consonne est très ancienne ; on a ainsi -i –ի final issu de *-iyos ou *-iyā dans les mots tels que ari արի « brave ».

Sans disparaître, l’élément consonantique final peut subir des altérations ; ainsi le c final de *ec « je » correspondant à gr. ἐγώ (ego), lat. ego a subi le traitement de c devant consonne, c’est-à-dire est devenu s, d’où es ես ; -r final devient -ṙ –ռ dans nombre de cas, sans doute sous l’influence de mots suivants à ո- ն– initiale, ainsi cuṙ