Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/111

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brochure de vingt pages devait annuler douze partitions ? Est-ce que cette farce inepte, la Capitulation de Paris, supprimait ce prodigieux chef-d’œuvre : Tristan et Iseult ? Nous pensâmes que non. Un jour, je m’en souviens, je dînais à Pesth chez un banquier hongrois. Il était juif et haïssait Wagner à cause d’un livre de celui-ci sur les juifs ; mais il était musicien, et il admirait Wagner à cause des Maîtres chanteurs. Il me montra dans son cabinet un buste du maître allemand auquel il avait mis une couronne de lauriers sur la tête — et une corde au cou ! Nous crûmes qu’il convenait de penser comme ce juif hongrois, qu’il fallait admirer et détester l’auteur de Lohengrin, cesser d’être son ami sans cesser d’être son apôtre, et se borner à ne plus lui tendre les mains qui l’applaudissaient.

Telle fut notre attitude, après l’outrage, tant que Richard Wagner a vécu. À Bayreuth, il y a deux ans, nous avons considéré de loin, dans son apothéose, le créateur de Parsifal, et nous avons passé devant sa maison, autrefois familière, sans frapper à la porte…

Mais, maintenant, la mort est venue. Elle