Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou Louis XV. Il avait traduit Shakespeare, il imitait Gentil Bernard ou Dorat ; le tout, je pense, pour être plus poli. Il était aveugle depuis plusieurs années ; il n’en profita pas pour se comparer à Homère ou à Milton, tant il avait horreur de toute outrance. Il s’effaçait paisiblement, doux, aimable, aimé. Je n’ai pas voulu passer sans lui sourire devant cette chère et modeste mémoire.

À la même époque, il y avait trois autres poètes, plus jeunes, plus grands, très grands. Dans la hauteur sublime de ses rêves, dans la fierté de son pur génie, Leconte de Lisle, plus illustre que célèbre, planait, n’interrogeant qu’Homère ou Hésiode évoqués sur la beauté de ses Poèmes antiques.

Charles Baudelaire, qui déjà ravissait de rares esprits, étonnait la multitude des sots ; il passait pour quelque peu diabolique, en attendant qu’on le reconnût divin.

Plus imprudent et plus familier, Théodore de Banville jetait sur tous à pleines mains ses resplendissantes pierreries. Celui-là, il fallait bien qu’on le vît, car il éblouissait de tout près. Ce rôle de météore à travers la foule obscure