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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/110

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MÉPHISTOPHÉLA

portait autour d’un col de toile, droit. Seule, Sophie ne songeait pas du tout qu’il y avait là un prétendu. Avoir un mari, cette possibilité, toujours, lui était restée si étrangère, qu’elle ne savait pas y penser ; et aucune appréhension ne l’empêcha de se dire que ce serait très agréable, très amusant, pendant le congé du capitaine, d’avoir ce bon compagnon. Après le dîner, ils se promenèrent côte à côte dans le jardin, suivis, non de trop près, par les deux mères et par Emmeline ; ils parlaient de mille choses, de la vie en campagne, des batailles où il s’était trouvé ; elle l’admirait pour les quatre blessures qu’il avait reçues, elle les lui enviait ! Il lui dit : « Si vous voulez, je vous apprendrai à monter à cheval ; » elle accepta tout de suite ; et au moment de se séparer ils se donnèrent une bonne poignée de mains, comme deux hommes.

Ce fut une cordiale camaraderie, une vie de bons garçons qui n’engendrent pas la mélancolie ; on faisait de grandes promenades en forêt, Jean et Sophie à cheval, les mères et Emmeline en voiture, on dînait sous la tonnelle des auberges ; plusieurs fois, les deux camarades suivirent les chasses à courre, furieusement, au grand galop, franchissant les fossés, sautant par dessus les roches ; un jour, ils jetèrent leurs bêtes à l’eau