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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/131

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MÉPHISTOPHÉLA

plainte ; ses dents, sous ses lèvres jointes, avaient cessé de grincer, c’était plus affreux. Lui, il s’acharnait sur cette muette, sur cette immobile, avec la véhémence, plus éperdue d’être sacrilège, d’un violateur de tombe, qui voudrait obliger une morte à la résurrection du plaisir. Épouvantablement, il s’acharnait. Il mettait, ce soldat, dans ce déchirement, dans ce défoncement, une furie d’assaut ! Sa victoire ne s’achèverait que dans l’aveu de la défaite ! Mais, pas même en un cri d’horreur, pas même en un sanglot, cet aveu, il ne l’obtenait ! et il se ruait sur la martyrisée avec des ahans de bourreau que saoule le sang des tortures et qui exulte dans les supplices. Tant qu’enfin, comme un ivrogne tombe, il succomba à côté d’elle, dans un sommeil de brute.

Il y eut dans la pénombre de la chambre, hélas ! nuptiale, un long silence entre le petit bruit de la pluie sur les vitres.

Enfin, Sophie, restée là sur les draps comme une assassinée, remua, se dressa, s’assit. Elle avait sous les paupières l’horreur infinie d’un retour d’enfer. Elle ferma les yeux comme on fait quand on veut penser plus profondément. Elle demeura assez longtemps ainsi. Puis, très vite, elle tourna le regard vers l’homme qui dormait à côté d’elle ; un zigzag froid lui courut les reins.